[Nostaw & Miss_Cupcake] le deuil

Tout me semblait sombre et morose ce matin. La vie n’avait plus de sens, j’étais perdue, depuis longtemps déjà mais aujourd’hui plus que jamais. Les larmes ne cessaient de ruisseler sur mes joues. Désespoir, rage et néant s’accumulaient dans ma tête, comment m’en sortirai-je ? M’en sortirai-je même un jour ? Les arbres étaient à nu, le vent d’hiver me frappait sur le visage. Cette sensation de vide ne faisait que s’accumuler avec ce paysage macabre. Des corbeaux, un tas de corbeaux, comme dans ces films où l’on croit que jamais cela ne pourrait nous arriver. Des feuilles mortes au sol. Elles me rappelaient son corps inerte quand nous l’avons retrouvée. Mais que s’était-il passé ? La police n’en savait rien, moi non plus, personne. Mais je voulais savoir, je découvrirais pourquoi ma moitié m’avait été enlevée, je le jure. Tout le monde était là, ma famille, ses amis, même des gens que je ne connaissais pas. C’était notre adieu, notre dernière chance, notre dernier espoir de ne la voir rien qu’un instant. Jamais je n’aurais pu imaginer vivre sans elle, allais-je seulement réussir à continuer sans sa présence… Les sons résonnaient dans ma tête, un écho de « Toutes mes condoléances » sonnait faux. Mon crâne allait exploser je le sentais. Je n’avais plus aucun membre qui fonctionnait, je me sentais défaillir. D’un instant à l’autre j’allais tomber, la rejoindre mais ce n’étaient que les effets de cette douleur omniprésente en moi. Ma vue se brouillait, je ne voyais plus rien. Je sentais une étreinte, ma mère ? Mon père ? Je ne voulais pas savoir, je ne voulais rien savoir, je voulais juste qu’on me laisse tranquille, seule. Mon cœur se brisait à la vue de ce trou recouvert de terre, au moins le sien était rempli, le trou que j’avais, moi, ne se remplirait jamais. Des gens commençaient à partir, je n’avais pas vu le temps passer. Mes parents me suppliaient de venir avec eux pour rentrer mais je restais. Mes genoux se pliaient, je sentais la terre fraiche et humide à travers mes vêtements. Je lisais son nom, une dernière fois. Je versais toutes les larmes qu’il me restait. Puis je me relevais et prononçais mes dernières paroles à celle qui était tout pour moi : « Je t’aime ».

Je me réveillai ce matin, la douleur emplissant tout mon être. Je me forçai à sortir de mon lit, et même à manger quelque chose. J’aurai préféré rester sous ma couette, sans personne, à regarder chaque goutte de pluie tomber sur ma fenêtre.  Je sentais mon corps vide, mort, presque autant que mon âme. J’avais l’habitude de le voir, en me réveillant, comme pouvais-je savoir qu'il ne serait plus là aujourd’hui…  Je me levai, passai devant toutes ces photos, nos photos…  Puis après manger, je me lavai, sa brosse à dent était encore dans notre pot… J’allai m’habiller, quand je vis toutes ses chemises, qui sentaient encore son parfum, son foulard préféré, et le pire, la cravate, celle qu’il devait mettre le jour de notre mariage… Je ne pouvais me passer de lui, de sa présence réconfortante, rassurante…


Je ne voulais pas sortir de chez moi, affronter la douleur des gens, en plus de la mienne déjà lourde à porter. Je me mis subitement à pleurer, faisant pour la première fois tomber mon masque, tellement froid et rigide. J’entendais les voisins  parler depuis qu’il est… qu’il est… depuis son décès. Ils disaient : « Qu’elle est froide cette femme ! Son fiancé est mort et elle ne pleure pas ! » ou encore « Qui dit qu’elle l’aimait vraiment ! Si mon mari venait à mourir je verserais toutes les larmes de mon corps ! ». Tous pensaient que j’étais sans cœur. Or c’est faux. Et je le sais. J’aimais mon fiancé, je ne voulais pas le perdre. Je ne pus m’arrêter de pleurer pendant de longues minutes. Je me sentis faible tout à coup. Comme si tout pouvait m’atteindre, comme si je n’étais plus protégée. Il me manqua subitement encore plus…

Je ne pouvais l’oublier, comme ça. Je l’aimais trop, je l’aime toujours d’ailleurs. Rien ni personne ne pourra me le faire oublier. Encore moins l’enfant que j’attends de lui… Notre petite fille qui grandira sans avoir connu son père, qui aurait été le meilleur des papas du monde. Des souvenirs me revinrent, le jour où je lui ai dit, son visage s’illuminant, et notre joie commune… Tout plein de belles images traversèrent mon esprit : notre rencontre, nos fiançailles, le bonheur que je ressentais lorsque je le voyais rentrer le soir…

Je finis alors par me lever, et je sortis de la maison. Je puisais dans mes forces les plus profondes pour sortir de chez moi, aller à son enterrement, et à prononcer mon discours.


Je devais être forte… pour lui.