[franabisen et Anyamany] La magie de Noël

Vingt-quatre décembre 2012. La période d’attente interminable de mes chers petits-enfants était enfin révolue : Noël, leur fête, était arrivée. Ils répétaient tour à tour chacune de leurs cantiques, tout en attendant impatiemment l’arrivée de leurs cousins. Laurène, leur mère, ma fille, terminait les préparatifs de cette soirée qui s’annonçait exceptionnelle : les moindres traces de poussières y passaient. Le père de famille s’attelait à la surveillance de ses monstres. Quant à moi, du haut de mes soixante-treize ans déjà, je regardais le temps passer. Pour tout le monde ici, le temps semblait passer à la vitesse d’un escargot. Mais tout cela finît par disparaître rapidement quand le premier invité sonna à la porte.
Aussitôt, le stress monta chez chacun des habitants de la maisonnée. Pour ma part, je restai assise sur mon fauteuil, sans même bouger le petit doigt. Cet invité divin entra alors dans la maison. Les enfants se jetèrent aux bras d’Eliane, ma deuxième fille. Elle était accompagnée de son mari Christian et de ses deux enfants, Eléonore et Julien. Ils embrassèrent tout le monde, et les enfants s’éclipsèrent à l’étage. Je me retrouvai seule avec mes enfants et leurs conjoints. Les « jeunes » entamèrent une conversation, mais je ne parvins pas à la suivre. J’étais accaparée par mes souvenirs de réveillons, tous plus magnifiques les uns que les autres.
Tenez, par exemple, le réveillon de 1973. C’était le premier Noël d’Eliane, qui venait juste d’avoir un mois. La petite Laurène, du haut de ses deux ans, était une petite fille très timide déjà, chose qui n’a pas changé. Eliane étant un bébé très capricieux, je fus contrainte de la garder avec moi à table. Mon Dieu, quand j’y repense, je me dis que je n’aurais jamais dû faire ce choix. Nous nous installâmes donc dans le plus grand calme.
Les premières minutes se déroulèrent sans le moindre problème. Eliane se tenait tranquille, et daignait manger la nourriture qu’on lui proposait. Le dîner semblait être promis à se terminer sans le moindre problème. Vers vingt-deux heures, on se décida à aller coucher Eliane, au vu de l’heure tardive.
Je plaçai donc ma fille dans un berceau préparé pour l’occasion. Je commençai à lui chanter des berceuses. Au bout d’un quart d’heure, Eliane ne daignait toujours pas s’endormir. Elle poussa un cri, et je décidai de la ramener à table. Le reste du dîner se déroula dans le calme, et l’heure attendue de tous les enfants de la maisonnée, minuit, se rapprochait petit à petit. On sentait que l’enthousiasme des enfants grandissait peu à peu à l’étage. Quant à Eliane, je retentai plusieurs fois de l’endormir, sans succès. A minuit pile, tous les enfants descendirent à la queue-leu-leu tout en chantant leurs cantiques. Nous, les adultes, étions déjà assis, attendant patiemment. Quand le premier enfant commença à ouvrir ses cadeaux, Eliane commença à pleurer. Je me levai rapidement, et courus vers la nurserie. Au moment même où je la posai dans son berceau, elle s’endormit. La magie de Noël avait opéré. Ainsi, à chacun des premiers Noëls de ses enfants, la même chose se produisit. Etait-ce une simple coïncidence ? Si vous voulez mon avis, mon petit doigt me dit que le Seigneur a retenu le nom d’Eliane et qu’il opère sur elle et ses enfants la magie de Noël pour chacune de leurs premières expériences en matière de fêtes.
Ce Noël-ci, celui de 2012, commençait à se dérouler tel un Noël commun, non magique. On entendait les rires des enfants, je tentais tant bien que mal de suivre la conversation des « jeunes ». Il me semblait avoir compris que la discussion portait sur les avantages et les inconvénients des réformes de l’enseignement. Chose qui me parût idiote, après tout nous ne déciderions pas. A vingt-et-une heures, on se décida à passer à table. Je pensais que le dialogue allait évoluer, mais ce fût le contraire. On discutait de politique, et encore de politique. Je crus m’endormir. Jusqu’au moment où Marie, ma sœur, prît la parole :
« Bon, les jeunes, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais c’est Noël, et la politique, nous, c’est pas notre truc. »
Les « jeunes » se regardèrent et manquèrent d’éclater de rire. Mais face au regard sévère de Marie, leur visage changea immédiatement d’expression. Un silence d’or régnait sur la salle à manger. Au bout d’une longue minute, on entendit au loin la petite voix d’Eléonore :
« Hé, Julien, rends-moi ma poupée ! »
Tout le monde éclata de rire. Je changeai d’avis, ce Noël s’annonçait magique. Les rires durèrent quelques minutes, jusqu’au moment où tous les enfants débarquèrent dans la pièce. Eléonore prît la parole :
« Mais euh, pourquoi vous rigolez fort comme ça ? On n’entend rien au film !
_Mais ne t’inquiète pas, ma chérie, on va arrêter de rigoler, répondit Eliane.
_Ah, bah, j’espère, hein, renchérit la petite fille. Sinon vous êtes tous des gros bébés ! »
Nous regardâmes les enfants remonter calmement. Laurène prît la parole :
« Dis donc, elle a un fort caractère, ta fille !
_Oh, oui. Mais bon, elle nous fait rire, c’est le principal.
_Dites, les jeunes, demandai-je, il va bientôt être minuit, non ? Vous ne croyez pas qu’il est temps d’installer les cadeaux ?
_Si, si, maman, me répondit Eliane. Bon, allez, c’est parti ! »
Les cadeaux furent installés dans la joie et la bonne humeur. A minuit pile, nous appelâmes les enfants qui descendirent dans les dix secondes qui suivirent.
« Ouais, les cadeaux ! s’exclama Eléonore. »
La petite fille se jeta sur ses cadeaux en riant. Elle ouvrît son premier présent en deux temps trois mouvements. Une fois cela fait, elle cria :
« Ouais ! Une barbie princesse ! Merci père Noël ! »
Je souris, et regardai par la fenêtre. A cet instant précis, je crus apercevoir le père Noël sur son traîneau dirigeant ses rennes. Je murmurai :
« Merci, père Noël. »

Noël...avec ma belle fille

Mon thé commence à refroidir. Mon vieux chat installé sur mes genoux baille à s'en décrocher la mâchoire et j'observe les flammes de ma cheminée crépiter.
Je ferme les yeux quelques secondes, appréciant ce silence seulement dérangé par les tintements des cloches que j'ai accrochées devant ma porte.
Est-ce-possible?! Un brouhaha se fait entendre devant ma porte, suivi du bruit de ma sonnette qui retentit plusieurs fois.
-« Je vais tous les massacrer! »Grognai-je en me levant pour attraper mon balai. « Encore ces sales gamins qui viennent pour chanter leurs chants de Noël à la noix! Je leur en ficherai moi des chansons. »
J'ouvre la porte brutalement.
-« Ouste! »Je hurle. «Déguerpissez! Et plus vite que... »
Zut. Ce n'était pas ces sales mômes.
Mon fils et ma belle-fille m'observent depuis le palier l'air étonnés. De stupeur, je lâche mon balai.
-« Bonjour Maman! s'écrie mon fils.
- Bonjour belle-maman! La forme? »Demande joyeusement Suzanne, sa femme.
Je leur referme brutalement la porte au nez. Une respiration. Deux, trois...
-« Oh, Gérard, dis-je au portrait de mon mari qui trône au dessus de la cheminée. Philippe est revenu! Souhaite-moi bonne chance! »
Mon mari semble m'adresser un clin d'œil du haut de sa cheminée et je rouvre la porte.
-« Philippe! » je hurle. « Mon fils chériiiii! »
Je le serre dans mes bras.
-« Enchantée madame! Me salue ma belle-fille.
- Bonsoir Suzanne! Venez, entrez! »
Je trépigne de bonheur. Tout en balançant une bûche dans le feu, en mettant la table, en astiquant les tableaux, je fais la conversation.
-« Deux mois mon chéri! Deux mois que je ne t'ai pas vu! Heureusement que le téléphone existe! Dommage, je ne sais toujours pas me servir de cette diablerie de machine! Ce n’est pas mon époque et puis...
- Maman, je ne vais pas pouvoir rester.
- Tu préfères une dinde ou du poulet parce que...Tu ne peux pas rester? »
-Non, maman. Tu sais, être médecin c'est pas facile. Je dois même travailler aujourd'hui.
- Oh... »
Je refoule mes larmes. Une part de moi-même se réjouit que mon fils ait réussi dans la vie. L'autre part a envie de pleurer. A peine arrivé qu'il s'en va déjà...
-« Alors travaille bien chéri. »Lui dis-je tristement.
Il me lance un regard triste, puis me serre dans ses bras.
-« Ecoutez Elizabeth, dit Suzanne. Si vous voulez, je peux rester avec vous! Je ne travaille pas aujourd'hui.
- Pourquoi pas. Répondis-je tristement.
- Et bien, Suzanne, tu restes avec maman, d'accord ? Je vais devoir y aller. Au revoir mes deux chéries! Joyeux Noël! » Lance mon fils en nous saluant.
Joyeux Noël, tu parles. Seule avec ma belle-fille.
-« Asseyez vous donc! Je vais préparer une buche de Noël! Lance joyeusement Suzanne.
- Une buche? »
- J'ai une recette secrète. Me dit-elle en me souriant.
- Quoi?!Va donc préparer ça, on va voir si ta recette est meilleure que celle de mamie Elizabeth !
- Vous l'aurez voulu, belle-maman! En garde! »
Nous nous précipitons dans la cuisine pour préparer nos gâteaux.
-« Ouh mes vieux os!
- Ca va Elizabeth? demande ma belle-fille, inquiète.
- Ouch. Ca va mieux! A qui fera la meilleure buche »m’écriais-je, en la faisant sursauter.
Je suis retombée en enfance. Pendant toute la soirée, je m'amuse, nous plaisantons avec ma belle-fille, je me reçois un sac de farine dans la figure (bon d’accord, je lui ai envoyé le paquet de sucre mais ça se fait pas d’agresser les personnes âgées à coup de sac de farine ! GASPILLAGE ! Pff.), et je casse deux, trois œufs (bon, d’accord, une boîte entière mais c’est pas ma faute !).

-« Arf. Ta buche est meilleure. »Avouais je à Suzanne.
Après une danse de la victoire de ma belle-fille, nous nous installons au coin du feu, elle sur le tapis et moi sur mon vieux fauteuil.
-« Elizabeth, vous savez? Me demande-t-elle.
- De quoi? »
- Je vous adore. »
Ding ding ding ! Attaque frontale ! Compliment sournois par derrière !
Un petit silence s'ensuit. Bon je l'avoue, j’ai apprécié ce compliment.
Ma belle fille me fixe….Ah ! Je comprends ! Elle attend que je lui retourne le compliment !
-« Moi aussi...Mais je m'ennuie. »
Et, hop ! La mamie contre-attaque ! Déclaration sournoise !
-« Pourquoi? »Me demande-t-elle.
- Il me faudrait des petits-enfants à faire sauter sur mes genoux. C'est pour quand? »
Et la mamie a gagné le premier round !

-« Bah...euh...elle rougit. En fait, c'est déjà en route.
-QUOI?! »
Mamie K.O. Victoire à la belle-fille !
Tais-toi, cerveau ! Tais-toi !!
Je tombe presque de mon fauteuil (bon, d’accord, je suis vraiment tombée) et je me précipite vers elle.
-« Un petit enfant!!Je suis comblée! Depuis le temps que j’attends ça ! Maintenant, je suis vraiment mamie ! »
Je me mets à caresser le ventre encore plat de ma belle-fille.
-« Bonjour mon chéri! C'est mamie qui parle! Comment ça va? Scrogneugneu! Bah oui, c'est mon bébé à moi! A qui, hein? C'est le bébé de qui? C'est le bébé de mamie Elizabeth! Mon petit bébé adorable... »
Suzanne me fixe bizarrement.
-« Bah quoi? »
Nous éclatons de rire. Finalement, même si mon fils était absent, j'ai eu de magnifiques cadeaux !
-« Au fait, Elizabeth. Philippe m’a dit de vous donner ça. » Dit ma belle fille.
Elle me tendit un petit paquet doré.
Je l’ouvre fébrilement, puis je découvre une petite chaînette en argent.
Quelque chose est gravé dessus : A ma maman adorée, je t’aime.
J’en ai les larmes aux yeux. Maintenant, mon bonheur est complet!Je serre ma belle-fille dans mes bras.
-Vive la magie de Noël...dis-je au tableau de mon mari. Il me sourit. Je lui souris. Nous sommes heureux.