[Lyson & Siphoë] L'égoïsme

Chers amis, je vous offre ce texte. J’ai passé de merveilleuses années à vos côtés. Vous m’avez beaucoup apporté, peut-être trop, ou en tous cas plus que ce que vous auriez dû. Mais je ne peux plus. Viens un temps où l’on doit s’occuper de sa vie, faire des choix. Ça me fait mal au cœur de vous dire ça, mais j’ai fait le mien.

Il était une fois une toute petite fille. Petite de part son âge, car sa pensée était plus grande que celle de la plupart des adultes l’entourant. Et sa plus belle grandeur, sa générosité. Enfant, vous avez tous partagez avec votre camarade un bout de gâteau à la récréation, n’est-ce pas ? Où quand votre petit frère pleurait, vous lui avez tous prêté la peluche que vous aviez reçu à votre anniversaire et qui comptait énormément pour vous ? Et plus tard, vous avez tous au moins une fois donné une pièce à un mendiant où à des acteurs de rue ? Et bien elle, ce n’était pas qu’une fois, mais une multitude de fois. C’était son quotidien. Et surtout, elle offrait tout l’amour qu’elle pouvait donner, que ce soit à sa famille, mais aussi à des étrangers. Elle adorait les autres, et surtout leur faire plaisir.

Mais avec le passage du temps, la petite fille grandit. Ses illusions partirent. Elle se retrouvait dans un monde qui n’était pas fait pour elle. Alors elle changea. Elle ne pensa plus aux autres, mais à elle. Le monde tel qu’elle le voyait avec ses yeux d’enfants avait changé du tout au tout. Ses parents n’étaient plus là pour là pour la protéger. Ce monde, c’était celui de l’argent. Et qui dit argent sous-entend pouvoir. Et elle ne pensa plus aux autres, mais à elle. Dès qu’une opportunité se présentait à elle, elle faisait tout pour empêcher les autres de se la procurer. Elle gravit peu à peu les marches du pouvoir. L’argent lui faisait de plus en plus tourner la tête. Ses valeurs changèrent. Elle ne se souciait plus des autres. Sa famille n’étant pas assez riche, elle lui tourna le dos. Elle se trouva un homme aussi attiré par l’argent qu’elle. Ils se marièrent par intérêt. Sa côte de popularité augmenta. Son pouvoir aussi. Ils eurent des enfants. Elle ne s’en occupa même pas, trop occupé par sa conquête de pouvoir. Et un jour, ce fut la crise. Ils perdirent tout. La marié voulu se tourner vers sa famille. Personne ne voulait se réconcilier avec elle. Il y avait des choses qu’on ne pouvait pas pardonner. Etre mis à l’écart à cause de leur manque de richesse, c’était impardonnable. Puis son mari la quitta pour une autre femme, plus belle et plus riche. Elle se retrouva seule avec trois enfants. Et un jour, eux aussi la quittèrent. N’ayant plus personne, elle se dit que la vie ne valait plus la peine d’être vécue.

Tout ça pour vous dire que j’étais un peu comme cette petite fille, innocente. Mais la vie m’a donné une belle claque. Aujourd’hui, j’ai dix-huit ans. Et à dix-huit ans, on est plongé dans un monde régit par l’argent et où le pouvoir nous tend la main. Et comme les imbéciles que nous sommes, nous la prenons. Et je ne fais pas exception. Et je ferais tout pour atteindre mon but, quitte à laisser des gens de côté et à être égoïste. Et pour ça, je vous fais ma lettre d’adieu. Pour pouvoir réussir, je vais devoir laisser de côté mes passions, mais surtout vous laisser tomber, car vous vous trouver sur mon chemin et m’empêchez d’atteindre mon but. J’espère juste ne pas avoir le même destin que cette petite fille. Mais la vie est un grand jeu dont on ne connaît jamais la fin.

Je vous dis donc au revoir, vous ne me reverrez sans doute jamais.
Laura

*

La nuit venait de tomber sur Lyon. Le ciel était couvert. Un ballet de voiture presque silencieux défilait sur la grande avenue. C’était comme si la ville retenait son souffle . Dans un quartier de banlieue, quelques appartements étaient éclairés. Dans l’une d’elle, un homme, confortablement installé dans un canapé miteux lisait la lettre. Son cœur se serait à chacun de ses mots, doux et amers à la fois.

« Et voilà comment elle me remercie, moi qui ait tout fait pour elle ? Je me suis crevé le c** pour elle. J’ai tout sacrifié. Mon job. Mes amis. Ma vie. Tout. Je lui ai tout donné. Et qu’est-ce que j’ai en retour ? Une lettre pleine de promesses et d’excuses … Mais pas pour moi … Pour les autres. »

Il resta longtemps à contempler la lettre, après l’avoir lue et relue maintes et maintes fois. De nombreuses émotions le secouaient. Mais il ne savait pas les nommer. Il était tellement peut habituer à se faire rejeter, sans aucune explication. D’habitude, c’était lui qui prenait et jetait les gens, suivant ses humeurs et ses besoins. Mais avec elle, c’était différent. Il l’avait aimée. Quelques tristesse. Lui qui n’aimait personne, à part lui-même, sa personne, son physique, son image. Et il l’avait rencontrée. Elle lui avait montré une autre partie de lui-même qu’il n’aurait jamais soupçonné posséder. Mais après cette lettre, il était sûr qu’il n’aimerait plus jamais personne. Ca faisait trop mal. Sur ces pensées, il s’endormit. Ce fut le facteur, le lendemain, qui le réveilla.