[Goby03 et Lehanna] Voyage scolaire

___« N’oubliez pas : on ne fume pas, on ne boit pas d’alcool, on laisse ses papiers dans son sac ou on trouve une poubelle publique. Ce lieu est naturel et propre, il doit le rester ! », recommanda une dernière fois le professeur.
___Ses paroles furent noyées par le brouhaha des trente-deux élèves qui sortirent du bus quand les portes s’ouvrirent. Ils se précipitèrent à la lisière de la forêt, qui se dressait devant eux, à côté du parking.
___Les rayons du soleil illuminèrent la peau blanche de Marie quand elle sortit. Elle fronça les sourcils. Sortie à la con ! Elle aurait mieux fait de rester chez elle. Maintenant, elle allait s’ennuyer toute la journée, avec Angie et ces abrutis qui la collaient comme des chewing-gums.
___Elle secoua la tête d’agacement et ses cheveux cuivrés se balancèrent dans sont dos. Elle se retourna brusquement et regarda son amie sortir.
___« Allez, dépêche-toi, Angie. On a quartier libre tout ce matin, il faudrait pas qu’on le gâche », lança-t-elle d’une voix ennuyée.
___Les deux filles de quinze ans s’apprêtaient à s’enfoncer dans la forêt lorsqu’une voix les interpella. Marie s’arrêta avec un soupir, mais son amie se retourna.
___« Hé, Angela ! Vous allez dans la forêt ? demanda un garçon de leur âge.
___- Oui, Paul, c’est ça. Il y a tellement de choses à faire, tu fais bien de poser la question ! répondit-elle, ironique.
___- On pourrait venir avec vous, Max et moi… ? dit-t-il avec un regard gêné vers Marie.
___- Ouais… mais pas touche à Marie ! »
___Le garçon opina et s’approcha des deux filles. Le trio fut bientôt rejoint par un jeune homme blond, Max. Avec un petit regard hautain, Marie se mit en route, les lèvres pincées, suivie du petit groupe. Max n’arrêtait pas de reluquer Marie, qui s’en aperçut très vite.
___Elle s’arrêta, et sans se donner la peine de le regarder, le remit à sa place.
___« Hé ! je sais que je suis belle, mais y a des limites, ok ? J’ai pas voulu que vous veniez pour toujours être dévisagée ! »
___Un ange passa. Max baissa la tête, un peu honteux, sous les regards accusateurs des deux filles et celui, désolé, de Paul. Les minutes s’étirèrent, Marie soupira et s’assit en tailleur sur une pierre plate. Des brindilles sèches craquèrent sous son talon compensé.
___« Bon, fit Angela pour rompre le silence, on devrait être assez loin, maintenant.
___- Pourquoi ? demanda naïvement Paul.
___- Pour ça, banane ! », répliqua Marie, qui semblait mettre de côté l’incident et avoir retrouvé un semblant de bonne humeur.
___Elle lui lança un paquet moitié vide de Malboro, ainsi qu’un briquet bleu turquoise. Il les rattrapa au vol, avec un regard interrogateur.
___« Tu crois quand même pas qu’on va écouter ce vieux grabataire, quand même ? On doit déjà supporter… ce lieu propre et naturel, pas besoin d’en rajouter », lui dit-elle en regardant des paquets de chips qui traînaient.
___Paul haussa les épaules, piocha parmi les cigarettes du paquet et l’alluma. Il passa le paquet à Max, qui le passa à Angela, qui elle-même le passa à Marie.
___Quelques secondes plus tard, la clope au bec, et toutes tensions oubliées, ils bavardaient joyeusement. Max, d’abord un peu mal à l’aise, se prit vite au jeu et s’entendit finalement bien avec Marie, qu’il n’avait jamais vraiment approchée jusqu’à ce jour.
___« Et là, le prof s’est ramené et il les a vu en train de saccager le vestiaire. Ils tiraient d’ces têtes, vous auriez dû être là pour les voir ! », s’exclama-t-il.
___Marie éclata de rire. Elle tapota sa cigarette pour que le surplus de cendres, brûlantes et rougeoyantes, en tombe. Elle ne fit pas attention qu’elle la secouait au dessus d’un petit monticule de brindilles sèches, jusqu’à ce que Paul intervienne d’une voix alarmée.
___« Vous trouvez pas que ça sent le brûlé ? »
___Elle tourna alors la tête vers les brindilles, qui avaient pris feu. Les flammes se propagèrent sur les feuilles sèches, et finirent par atteindre le tronc d’un arbre. Tout ça avant qu’ils puissent réagir.
___« Oh, merde, merde, merde ! jura Marie en se levant. Magnez-vous, vite, courez ! »
___Tous bondirent, lâchèrent leur cigarette, qui mirent le feu aux feuilles sur lesquelles elles étaient tombées, et coururent. Max, rapide et endurant, ouvrait la file. Derrière suivaient Paul, qui tirait Angela par le bras, puis une dizaine de mètres plus loin, il y avait Marie.
___Malheureusement, ses talons de huit centimètres ne facilitaient pas sa course. Le feu commençait à se propager, les troncs commençaient à se faire calciner ou ceux qui étaient déjà en proie aux flammes finissaient par exploser. La fumée embrouillait les idées de la jeune fille et elle n’eut pas la présence d’esprit d’enlever ses sandales pour courir plus vite. Elle se mit à tousser, tellement fort qu’elle dut s’arrêter. À genoux, elle tenta d’appeler les autres, d’une voix trop faible pour être entendue.
___« Attendez… s’il-vous-plaît… »
___Puis la fumée eut raison de ses poumons et elle s’effondra.